Beaucoup de sportifs ne prêtent pas vraiment attention à l'état de santé de leur foie. C'est seulement quand celui-ci montre quelques signes de faiblesse qu'ils perçoivent alors que cet organe vital tient un rôle prépondérant dans le métabolisme énergétique, la digestion des graisses alimentaires, l'élimination des déchets de l'organisme et l'élaboration de nombreuses molécules essentielles à la vie.
LE FOIE, UN ORGANE MULTITÂCHE
Le foie est constitué de 4 lobes et possède un haut pouvoir de régénération. Il est parcouru chaque minute par environ 1,5 à 2,4 litres de sang via une double irrigation : l'artère hépatique pour l'apport d'oxygène et la veine porte pour celui des nutriments absorbés par l'intestin. Il est également le point de départ de voies biliaires et de divers canaux nécessaires au transport de la bile vers le canal cholédoque et le duodénum.
Le foie accomplit de très nombreuses missions :
- Mise en réserve et production d'énergie
- Fabrication de la bile nécessaire à la digestion des graisses alimentaires
- Défense de l'organisme via les cellules de Küpffer
- Stockage de vitamines (A, D, B12) et de fer
- Élaboration de nombreuses molécules (synthèse protéique, cholestérol, acides gras, triglycérides, lipoprotéines VLDL, HDL, LDL)
- Désaturation/élongation des acides gras polyinsaturés
- Transformation/neutralisation/élimination des hormones, toxines, bilirubine, médicaments…
LES MISSIONS ÉNERGÉTIQUES DU FOIE
Le foie participe au maintien de la glycémie au repos et durant une pratique sportive. Pour cela, il met en scène diverses voies métaboliques :
- La glycogénogenèse : stockage du glucose sous forme de glycogène (80 à 120 g environ).
- La glycogénolyse : libération de glucose dans le sang à partir du glycogène stocké.
- La néoglucogenèse : fabrication de glucose à partir de composés non glucidiques (acides aminés, lactate, glycérol).
- La cétogenèse : synthèse de corps cétoniques (acétone, acétoacétate, ꞵ-hydroxybutyrate) à partir d'acides gras issus des aliments et du tissu adipeux. La cétogenèse permet de freiner la néoglucogenèse.
L'EXERCICE PHYSIQUE EST-IL BON POUR LE FOIE ?
Pendant l'effort, le maintien de la glycémie fait intervenir la glycogénolyse et la néoglucogenèse hépatiques si l'exercice se prolonge et que les stocks glucidiques menacent de s'épuiser. Une hypoglycémie durant une activité physique traduit un épuisement du glycogène hépatique ! La prise de glucose durant la pratique sportive via une boisson d'effort, une purée de fruits ou une barre énergétique, permet justement de freiner la baisse de ces réserves, de limiter le risque de déficit et d'hypoglycémie.
Au cours d'un effort physique d'intensité modérée à intense, un soudain manque de glycogène au sein des principaux muscles sollicités par la pratique ne sera pas compensé par un apport de glucose en provenance d'autres fibres musculaires moins concernées par l'exercice. À ce niveau, l'entraide n'existe pas. Cette mission incombe de nouveau au foie. Le muscle dépense et prélève, le foie gère les stocks et pourvoit au manque... si c'est possible.
EST-CE QUE COURIR OU FAIRE DU SPORT NETTOIE LE FOIE ?
Au cours de la pratique sportive, l’utilisation par les muscles d’acides aminés comme source d'énergie génère la production de déchets azotés et notamment d'ammoniac (NH3). Cette production s'élève lors d’efforts intenses, de longue durée et en présence d’un épuisement ou d’un manque de glycogène. L’ammoniac est un produit toxique, il est évacué du muscle et rejoint la circulation sanguine sous forme de glutamine. Plusieurs issues s'offrent alors à cet acide aminé :
- Servir de source d'énergie aux globules blancs et aux entérocytes
- Rejoindre le tissu hépatique pour y être transformé en glutamate et générer une nouvelle production d'ammoniac. Ce déchet emprunte ensuite la voie métabolique de l'uréogenèse afin d'être définitivement éliminé dans les urines sous forme d'urée.
En outre, les turbulences vasculaires et l'impact podal en course à pied sont susceptibles d'occasionner une rupture de la membrane de globules rouges (hémolyse).
L’hème de l'hémoglobine libéré dans le sang au cours de cette hémolyse est transformé en bilirubine dans la rate puis acheminé au niveau du foie par l’albumine. Cette bilirubine est ensuite conjuguée à l’acide glucuronique puis évacuée avec la bile dans l’intestin. Une partie de cette bilirubine conjuguée retourne dans le foie pour être recyclée ou éliminée dans l’urine sous forme de pigment (urobiline). Celui-ci est responsable de la couleur jaune de l'urine. Le reste est transformé par la flore iléale et colique pour donner d'autres pigments à l'origine cette fois-ci de la couleur des matières fécales.
Consommation d'alcool : quel problème pour le foie ?
Lors d'une consommation d'alcool, 5 à 25% de celui-ci sont dégradés dans le foie. Le produit final obtenu (acétyl-CoA) incorpore le cycle de Krebs et intervient dans la production d’énergie (ATP). Un verre de vin n'est donc jamais vraiment inoffensif pour cet organe.
Utilisée parfois comme substance désinhibante et décontractante, l'alcool avant l’effort peut néanmoins troubler la néoglucogenèse hépatique.
En outre, le catabolisme hépatique de l'alcool consommé au terme d'une activité physique génère des composés dont la régénération aboutit à la synthèse et à l'accumulation de triglycérides, à la formation d’acide lactique. Quelques bières après l'effort peuvent également suffire à contrarier la réparation des muscles et la récupération énergétique (perturbation de la reconstitution des réserves musculaires et hépatique de glycogène).
COMMENT SOULAGER LE FOIE ?
Le foie est un organe soumis à rude épreuve et fréquemment malmené par la pollution industrielle, le tabagisme (actif ou passif), la présence de résidus de pesticides dans les aliments, les traitements médicamenteux, la consommation d'aliments industriels sources de graisses oxydées, la dysbiose et l'hyperperméabilité intestinales, la prise régulière et excessive d'alcool.
Syndrome de surcharge : quand la poubelle est pleine !
De nombreux signes et désagréments peuvent apparaître en présence d'un foie surchargé. Ils influent sur l'état de santé :
- Bouche/langue pâteuses, mauvaise haleine (halitose)
- Maux de tête, nausées, écœurement après quelques bouchées
- Fréquents réveils nocturnes, sommeil non réparateur, asthénie et anorexie au réveil
- Fatigue intense après les repas
- Incommodité aux odeurs fortes (parfums, odeur d'essence,...)
- Teint jaune, selles grasses et flottantes (stéatorrhée)
- Baisse de vitalité, digestion difficile des graisses
- Syndrome prémenstruel
- Excès de graisse dans le foie
Une détox parfois nécessaire
Des enzymes du foie (cytochrome P450, enzymes de conjugaison...) jouent un rôle essentiel dans l'élimination des toxines et des toxiques présents dans l'organisme. Leur fonctionnement et leur efficacité sont étroitement subordonnés à l'apport en quantité suffisante de micronutriments (vitamines, minéraux, oligoéléments, antioxydants...). Des plantes drainantes (reine des prés...), celles aux vertus cholagogues et cholérétiques (chardon marie, artichaut...) et des acides aminés soufrés (taurine, cystéine, méthionine) peuvent soutenir la mission de nettoyage.
QUEL RÉGIME POUR ÉVITER L'ACCUMULATION DE GRAISSE HÉPATIQUE ?
En cas de surcharge au niveau du foie et afin de faciliter son rôle d'épurateur, il paraît utile d'adapter son régime alimentaire et de privilégier la consommation de :
- fruits murs de saison,
- légumes de saison crus et cuits (vapeur),
- crucifères, ail, oignon, échalote,
- produits céréaliers avec farine complète, ½ complète, légumineuses,
- huiles végétales bios/vierges/extra, de première pression à froid (huile d'olive, colza, noix),
- épices (curcuma, gingembre…), thé vert, herbes aromatiques (basilic, romarin…),
- viandes et poissons « maigres »,
- eau plate (1,5 à 2 litres/jour).
L'apport de sucre et de produits sucrés, de produits industriels ultra-transformés, d'huiles de mauvaise qualité, de charcuterie, de viandes grasses, d'œufs, de graisses cuites, de plats en sauce, de fromages, chocolat, café, alcool, tabac est à limiter. Le repas du soir de préférence allégé (assiette de crudités, huiles de bonne qualité, aromates, association céréales-légumineuses). Une règle à respecter : manger frais et varié !
FOIE DIMINUÉ : PERFORMANCE ALTÉRÉE
Le foie est un organe central du métabolisme énergétique. Il fabrique une multitude de molécules essentielles à la vie et constitue un filtre précieux capable de débarrasser l'organisme de substances toxiques susceptibles de troubler son fonctionnement. Une surcharge de celui-ci est souvent synonyme dans le sport de mauvaise récupération, de fatigue, de baisse des performances et de majoration du risque de blessure. Par conséquent chers sportifs, n'omettez-pas de vider régulièrement la poubelle !
Et puisque les bénéfices de la pratique sportive sur la maladie du foie gras et tout type de surcharge hépatique ont été largement démontrés, pratiquez la marche rapide ou tout autre activité d'intensité modérée mais endurante. Les résultats de nombreuses recherches montrent que 150 minutes de sport par semaine permettent de diminuer le niveau de graisse hépatique.
1 American journal of gastroenterology, 2023.